Les relations patients-médecins (Dr Jean Creplet)

15 novembre 2021

La pandémie a rappelé les incertitudes entourant les savoirs scientifiques mais aussi le besoin d'explications claires et de décisions justes. Ce paradoxe d'une exigence de clarté et de justice même en situation d'incertitudes se retrouve à toutes les échelles de pouvoirs et donc, aussi entre malades et médecins.

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Les fondamentaux de la relation patiënts-médecins

Face à tout problème de santé, trois questions se posent. Comment? Pourquoi? Combien? La science et la technique pour le comment, le sens et l'éthique pour le pourquoi, la valeur et l'argent pour le combien: malades et médecins assemblent des bâtons de savoirs et de pouvoirs individuels dans l'armature des puissants leviers de la politique et de l'économie.
 

L'art de donner du sens et la valeur à la science, n'a pas vraiment été mis en exergue à l'université. Le sens et la valeur s'apprennent par l'expérience et l'exemple, pas dans les cursus académiques. C'est au contact des malades que médecins et soignants réfléchissent au sens de leurs actes ; quant à leur valorisation financière, ils la perçoivent à travers les tarifs conventionnels conclus entre leurs représentants et les mutuelles, mais aussi dans le cadre non conventionnel où les pratiques ouvertes à une large clientèle donnent une véritable idée de la diversité des situations et des comportements face à l'argent. Aujourd'hui, impossible de nier l'importance du sens et de la valeur de nos actes. Le burn-out des soignants poussés à bout par certaines dérives du management et les tensions financières entre les différents acteurs du système l'illustrent.

Des mots du patient aux termes médicaux: la phase technique

Tout parcours médical commence par des demandes exprimées en langage courant. Quand le médecin prend la main pour préciser les choses, pas de doute, il est le patron. Il doit cependant rester attentif à toute réflexion susceptible d'apporter une pièce au diagnostic. S'il pense en termes techniques, il doit redevenir compréhensible au moment de conclure.
 
Le diagnostic et le traitement: quand surgit la question du sens
 
Quand la décision technique s'impose et que le patient l'accepte, la question du sens reste implicite. Elle surgit en cas de décision difficile, d'hésitation entre différentes possibilités. Elle se pose aussi quand le patient avance des arguments personnels pour ne pas suivre l'avis du médecin. La science de ce dernier a peu de prise sur la philosophie du patient, à moins de discuter avec lui en tant qu'être humain et non avec la casquette de l'expert. Face aux incertitudes, les pouvoirs des caractères et les talents comptent plus que les savoirs.

 

Au moment d'honorer le médecin

La Belgique offre un large éventail, du tiers payant au payement direct, conventionné ou non. La question des suppléments d'honoraires à l'hôpital, si controversée, sort du cadre de cet article, nous y reviendrons. Pour ma part, après avoir fait carrière dans les hôpitaux publics et toujours actif en privé, j'en arrive à la conclusion que la justice sociale en matière d'honoraires ne peut se réaliser qu'avec une grande diversité de l'offre tant pour les patients que pour les praticiens. Ceux-ci doivent apprendre sans honte que les prix se négocient. Et le patient doit pouvoir choisir le médecin qui lui convient sur tous les plans, également celui des honoraires. La liberté subtilement encadrée par le politique reste le meilleur moyen de permettre aux caractères modérés de neutraliser les extrêmes que l'argent rend fous.
 

L'essentiel dans les relations avec les patients

  • Éviter le jargon technique dans les conclusions, elles doivent être claires pour tous.
  • Discuter des incertitudes en cas de décision délicate tout en proposant une ligne de conduite.
  • Expliquer le pourquoi des examens, des médicaments et des recommandations.
  • Décrire le rôle du patient dans son suivi et ses possibilités de contact au besoin.

Élémentaire! Évident! Tout le monde sait cela! Pas si sûr! Nous savons tous que de nombreuses interférences de pouvoirs administratifs, juridiques, managériaux ou autres peuvent bousculer les espaces de liberté diagnostique, thérapeutique et relationnelle dont les malades ont tant besoin.

Ma thèse: les mutuelles, les gestionnaires, les juristes, les fonctionnaires et les politiques sont là pour faciliter notre travail sur le terrain et non pour mettre des bâtons dans les roues. A nos organisations de les en convaincre, à nous de montrer l'exemple dans nos pratiques.

 

Dr Jean Creplet

Source: Le Journal du médecin

 

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